En 1957, la grippe “asiatique” touchait la Seine-et-Marne A l’image du coronavirus Covid-19, l’apparition de la grippe “asiatique” en octobre 1957 a mobilisé la Seine-et-Marne, notamment à Melun où elle a frappé les jeunes générations. Elle est moins connue que la grippe espagnole, qui fit entre 50 et 100 millions de victimes à travers le monde entre 1918 et 1919. Mais elle n’en a pas moins été meurtrière.
La grippe sévit dans notre région… mais il n’y a pas lieu de s’affoler.
Il faut dire que la presse française voit cette grippe comme une autre, ni plus ni moins qu’un virus saisonnier. Tiens… Tiens… Pourtant, le virus, parti de Chine à l’hiver, s’apprête à faire plusieurs millions de morts sur la planète. Et à l’image du coronavirus Covid-19, il voyage léger. L’Asie est d’abord touchée (Hong Kong, Taïwan, Singapour…), puis c’est au tour de l’Australie, l’Amérique du Nord, et enfin l’Europe, l’Afrique et l’Amérique au début de l’été. Là encore, comme avec le Covid-19, l‘Italie diagnostique ses premiers patients avant la France, qui observera des cas isolés mi-septembre dans le Nord et l’Est ? décidément ! ? avant un pic atteint en octobre 1957.
Le Journal du dimanche du 13 octobre parle d’ « administrations fonctionnant au ralenti » et d’ « usines à demi-effectifs ». Le 14 octobre, La Rep rechigne encore à imputer les malades seine-et-marnais à la seule grippe « asiatique », mais plante un décor qui trouve encore écho aujourd’hui : Mais, contrairement à ce qu’on observe aujourd’hui, la grippe « asiatique » touche plus volontiers le jeune public que les personnes âgées*. À Melun, les établissements scolaires sont fortement impactés : L’internat du lycée de jeunes filles, qui comptait 70 grippées (dont l’infirmière), a fermé ses portes samedi (12 octobre 1957), raconte La Rep. Au lycée des garçons, le nombre des internes grippés est assez important.
Quid des externes ?
(Ils) sont moins touchés, mais, dans les classes, on note de un cinquième à un quart de grippés […] À l’institution Jeanne-d’Arc, trois classes : 4e, 5e et 6e ont fermé leurs portes la semaine passée. Enfin, dans les usines et l’administration, « l’absentéisme est déjà sensible, mais non alarmant. Des mesures de désinfection et de prophylaxie préventives ont d’ailleurs été mises en œuvre ».
100 000 morts en France
Si la situation ne semble pas catastrophique dans le département, les Seine-et-Marnais se ruent tout de même dans les pharmacies : « Seuls les cachets antigrippes et l’aspirine ont été demandés en plus grand nombre et l’approvisionnement est suffisant pour faire face aux besoins », note La Rep de l’époque. Avant de conclure, non sans une certaine lucidité qui en fera sourire plus d’un : Si l’épidémie persiste, il serait souhaitable que les pharmacies restent ouvertes le dimanche. Quoi qu’il en soit, la grippe semble heureusement assez bénigne et il convient seulement de rappeler les deux mesures à observer : se mettre au lit, au chaud, avec aspirine dès les premiers symptômes, et avoir la patience d’y rester le temps suffisant pour éviter les rechutes et les complications. Impossible de savoir combien le virus aura fait de victimes en Seine-et-Marne, ni combien de personnes il aura infecté puisque La Rep ne fera plus allusion à l’épidémie. Nous nous en remettrons donc aux estimations officielles de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : la pandémie de 1957 fut de type H2N2, et non H1N1, ce qui aura retardé la fabrication d’un vaccin efficace. Au cours de l’année 1957-1958, le virus aurait provoqué la mort de 1 à 4 millions de personnes dans le monde et contaminé jusqu’à 9 millions de Français au cours de l’hiver 1957-1958. Dans l’Hexagone, il aurait tué près de 100 000 personnes.
*Pierre Saliou et deux autres experts notent dans leur ouvrage La Grippe en face : « Trouvant devant lui une population dépourvue d’immunité préalable, le virus atteint un grand nombre de sujets à l’exception de ceux âgés de plus de 70 ans, qui semblaient plus résistants (On comprendra plus tard que ces derniers possèdent la mémoire immunitaire d’un virus similaire, datant vraisemblablement de 1889-1890).
*Patrick Zylberman, professeur émérite d’histoire de la santé à l’École des hautes études en santé publique, rappelle que les pouvoirs publics interviennent depuis longtemps dans la gestion des épidémies. Elles s’étaient trouvées également démunies lors de la pandémie de grippe asiatique qui a fait 30 000 morts en France en 1957-1959.
The virus emerged in China in the winter of 1957 and spread rapidly worldwide via ships, aeroplanes, and trains. In April, it sparked a major epidemic in Hong Kong, where about 250 000 people were infected, and by June India had seen over a million cases. Shortly afterwards, it made landfall in the UK, and by September outbreaks were being reported in England, Wales, and Scotland. General practitioners were “amazed at the extraordinary infectivity of the disease” and the suddenness with which it attacked younger age groups. Yet, while some members of the College of General Practitioners called for the UK Government to issue a warning about the dangers presented by the virus and coordinate a national response, the ministry of health demurred. Instead, the virus was permitted to run its course.
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