Chapitre 18
Le ministère
Il était 14h. Valérie était déjà épuisée par tous les ordres et contrordres qu’elle avait dû taper et envoyer. Tout d’un coup, Pi fit irruption dans son bureau.
« Ils sont en France, dit-il. J’en suis certain. Envoyez des ordres de vigilance maximale à tous les commissariats et aux gendarmeries.
-Mais hier encore ils étaient en Belgique…
-Vous occupez pas. J’ai mes sources. Ils sont en France. »
Et il sortit du bureau. Valérie sortit de son sac à main une clé USB et la brancha sur son ordinateur. Elle devait s’introduire dans les fichiers top secrets de la Défense pour avoir les plans de déploiement de la sécurité le surlendemain. Elle arriva à trouver les fichiers qui l’intéressaient et les téléchargea sur sa clé. Puis elle effaça toute trace de son intervention. Elle remit la clé USB dans son sac à main. Le tour était joué. Il ne restait plus qu’à se tenir informée des changements de dernière minute que Pi pourrait faire. Valérie s’était toujours sentie en sécurité au ministère. Mais le fait de savoir qu’elle travaillait sous les ordres d’un traître la déstabilisait. Et le fait de savoir que dans l’ombre une attaque de grande envergure contre l’administration du pays se préparait la terrorisait. Et si Guislain lui avait menti ? Et si ce garçon n’était pas Guislain ? Non. Il avait les accents de la vérité. Et il avait exactement la même façon de s’exprimer et de bouger que quand elle l’avait vu quelques mois avant au ministère. Il fallait tout de même qu’elle soit sûre. Elle se leva et se dirigea vers le bureau de Pi. Elle frappa à la porte et entra. Pi était assis à son bureau.
« Que voulez-vous ?
-J’ai besoin d’aller voir Guislain monsieur. Il faut que je m’absente de mon poste. C’est important.
-Pourquoi donc ? »
Elle y avait réfléchi. Quelle raison pourrait-elle bien donner pour aller voir Rousseau ?
« C’est à propos d’une affaire que ses parents ont suivi.
-Bien. Mais revenez vite. »
Elle sortit du bureau de Pi et se dirigea vers le parking. Elle avait garé sa Laguna bleue au 2ième sous-sol. Elle arriva à sa voiture et entra dedans. Puis elle démarra.
Elle arriva à la maison des Guislain à 16h. Il y avait de nombreux embouteillages dans Paris à cause de travaux divers et pas toujours justifiés. Elle se gara devant la grande maison en pierre Meulières et descendit. Elle sonna. Jeanne Guislain lui ouvrit.
« C’est à quel sujet ?
-Je viens voir votre frère, dit Valérie. J’ai quelques questions à lui poser.
-Bien. Entrez. »
Jeanne s’écarta pour la laisser passer. Puis elle conduisit Valérie jusqu’au salon où ‘Xavier’ était devant la télé. Valérie s’approcha de lui.
« Excusez-moi, dit-elle, je voulais vous parler de quelque chose en rapport avec l’enlèvement de vos parents. Il y a quelque chose de pas clair et…
-Mais c’est résolu depuis longtemps ça, intervint ‘Xavier’. Vous voulez savoir quoi ?
-Eh bien la date exacte où vous vous êtes fait attaquer et où vous avez su qu’ils s’étaient fait enlever.
-Mais j’en sais rien moi ! Vous avez des archives pour ça, non ?
-Oui mais on voulait confirmer que…
-Oui, je comprends. Mais vous n’êtes qu’une secrétaire et vous ne savez probablement pas tout. Demandez à vos supérieurs.
-Bien. Désolé de vous avoir dérangé.
-Au revoir. »
Jeanne raccompagna Valérie jusqu’au perron et celle-ci regagna sa voiture. Ce jeune homme n’était définitivement pas Xavier Guislain. Mais comment sa sœur s’était-elle fait prendre ? Mystère. Grand mystère. Valérie démarra et prit la direction du ministère.
Xavier, Quentin, Olivier, Eva et Sylvie passèrent le plus clair de la journée à se reposer et à parler du plan qu’ils suivraient pour intervenir lors de la cérémonie. Le fait d’être arrivés aussi loin sans encombres leur redonnait du courage. Aussi puissants qu’étaient leurs ennemis, ils n’avaient pas réussi à les empêcher de revenir ici. Mais le plus dur restait à faire. Il faudrait procéder avec précaution. Pas à pas. Etape par étape.
Vers 17h, ils reçurent un appel de Valérie sur le portable de Sylvie.
« J’ai envoyé sur mon ordinateur personnel les plans que vous m’avez demandés, dit-elle. Je vous donne le code : 633B92.
-Bien, répondit Xavier. On va étudier ça. On en parlera ce soir. »
Et il raccrocha. Valérie raccrocha également et sortit de son bureau pour aller voir si Pi n’avait pas d’autres instructions. Celui-ci n’était pas dans son bureau. Valérie demanda à sa secrétaire où il était et celle-ci lui répondit qu’il était avec le ministre de l’intérieur. Valérie se dirigea donc vers le bureau de son oncle. Au moment où elle voulait frapper à la porte, Pi en sortit. Il avait l’air triomphant.
« Qu’est-ce qui se passe ? demanda-t-elle.
-Le ministre et moi avons obtenu l’autorisation présidentielle de déployer des troupes militaires dans Paris mardi. Comme ça, nous réduirons le risque d’une attaque désespérée de Rousseau et de ses complices ce jour-là. »
Et ça permettra accessoirement de contenir la population après la prise de pouvoir, pensa Pi. Décidément ce Guislain lui rendait bien des services.
Valérie était interloquée.
« Mais ça ne serait pas plus simple d’annuler la cérémonie ? demanda-t-elle.
-Trop tard. Le Président va annoncer cela à la télévision dans 10minutes. »
Valérie retourna à son bureau et appela Sylvie.
« Allumez la télé, dit-elle. On en parlera ce soir. »
Et elle raccrocha. Puis elle alla rejoindre Pi dans la salle de crise. La télévision était allumée et le présentateur annonçait la déclaration imminente du Président.
« Et une information de dernière minute, disait-il, notre Président va s’adresser à la nation dans le cadre de la traque du criminel Jean Rousseau. Apparemment, un plan a été trouvé pour éviter tout problème pendant la remise de médaille à Xavier Guislain. »
Puis vint le jingle ‘une allocution du Président de la République’, puis le Président apparut, penché sur son pupitre, dans une position solennelle.
« Mes chers compatriotes, dit-il. Comme vous le savez tous, de dangereux criminels sont actuellement en liberté. La police est quasiment certaine qu’ils se trouvent sur le territoire français et mes services de renseignement m’ont informé que ces criminels allaient sûrement tenter une action désespérée à l’encontre de monsieur Guislain lors de la remise de la Légion d’Honneur. C’est pourquoi j’ai dû aujourd’hui prendre une décision difficile. Peut-être bien la plus difficile de mon mandat. Certains diront que je les trahis en faisant ce que je vais faire. Mais il faut que vous sachiez que je n’ai que l’intérêt du pays et de ses habitants à l’esprit. Ma décision est la suivante : à compter de lundi soir 19h et jusqu’à mercredi matin 8h, heure où monsieur Guislain sera en sécurité, des troupes militaires seront déployées dans Paris. En particulier aux environs de l’Elysée. Je demande à la population de faciliter le déploiement de ces militaires. Il en va de la sécurité nationale. Je demande à la population de rester calme. Et je vous prie de m’excuser. Bonne soirée. Vive la patrie. Vive l’Europe. Et vive la France. »
Xavier éteignit la télévision.
« Ca va être compliqué, dit Eva.
-Je crois bien, répondit Xavier. On en parlera avec Valérie quand elle rentrera. »
Celle-ci rentra vers 22h. Elle était tout aussi catastrophée que les autres de la décision du Président.
« Evidemment, dit-elle, je pense que Pi est derrière tout cela. Ca joue son jeu à merveille.
-Bien sûr, dit Xavier. Mais il faut qu’on trouve un plan. Vous pouvez prendre votre journée demain, Valérie ?
-Non. Mais je peux prendre mon après-midi. Mais le matin, je dois m’assurer que le passage de pouvoir entre la police et l’armée se fait bien.
-Bien, dit Xavier, alors on aura du pain sur la planche demain après-midi. Et mardi sera le jour de la vérité. »
Il était une fois en France – Annexes